Par Fanny Cheung

Remplir un zine de son regard

Publié le 27 Fév. 2023

Gros plan sur un début de dessin à l'encre. On peut lire un titre

J’aime beaucoup le format du zine. Ça permet de s’auto-éditer, de promouvoir des idées facilement, de s’amuser. C’est quoi vos zines préférés ?

En visitant une librairie la dernière fois dans le Perche, je suis tombée sur des livres de coloriages. Quand j’étais petite, ma mère photocopiait les livres de coloriages, les nôtres, ceux des autres. Ça nous donnait des pages et des pages d’un même dessin à remplir avec nos feutres. C’était chouette, on pouvait rater un coloriage et recommencer juste après avec une nouvelle tentative.

Je trouve l’activité de coloriage apaisante mais peu créative pour les enfants. Des images créées par des adultes pour cadrer la fantaisie d’un·e enfant, ça laisse peu de place aux inventions rigolotes et aux visions personnelles du monde. Je me suis mise à fureter pour voir ce qu’il se faisait en terme de coloriage. J’ai retrouvé le terme d’anti-coloriage que j’avais déjà croisé il y a un temps. Un anti-coloriage, c’est une page avec un début de dessin et une consigne, à suivre ou non, pour le continuer à sa guise. Pour les enfants, ça favorise l’imagination. Pour les adultes, le lâcher-prise.

J’ai laissé décanter ces recherches pendant quelques mois. C’est drôle de voir comment on s’imprègne de ses lectures jusqu’à en oublier l’origine. J’ai toujours une phase où je passe mon temps à réfléchir et à lire. Je fais des croquis sans queue, ni tête et je prends des notes. Impossible pour moi dans ces moments de dessiner ou peindre sur le sujet. Même quand j’essaie, le résultat est immanquablement rigide et sans vie.

Puis, soudain, je me mets à dessiner sans intention. Mes mains se dirigent automagiquement vers ce que j’avais tenté quelques semaines plus tôt. Vous l’avez deviné, je me suis lancée dans des anti-coloriages.

J’aime l’idée d’une interaction active entre l’auteurice d’un dessin et son lectorat. Plus particulièrement, lorsque les personnes qui se servent ou observent le dessin ne pratiquent pas elleux-même une activité de création. Ça donne de bons outils pour enseigner. 

Pour habituer progressivement à l’idée d’apporter sa touche sur le dessin d’une autre personne, j’ai produit quatre esquisses de dessins avec de plus en plus d’espace. J’ai pensé au format du zine parce que j’avais envie de tester mon idée facilement. Auto-édition maison.

Le zine a la qualité d’être reproduit facilement et permet de se rater plusieurs fois. Je trouve que c’est un point extrêmement important pour inciter à la création. Qui n’a pas gardé dans son tiroir des carnets ou journaux à remplir trop jolis pour être utilisés ? Je veux qu’on utilise mon zine, même si ce n’est qu’une personne. Je veux qu’on l’utilise, pas qu’on l’expose ou qu’on l’enferme. C’est son but premier. On m’a déjà dit de ne pas dessiner en premier dans un carnet collaboratif : “les autres n’oseront pas dessiner après”. C’est là où la reproductibilité du zine a son rôle à jouer. Tant pis si c’est “moche”, on peut recommencer sans peine.

J’ai décidé d’appeler cette série “Æncrage” pour poser un thème qui me tient à cœur et sur lequel je n’arrive pas à travailler : m’ancrer dans mon quotidien et mon territoire. J’en reparlerai plus longuement dans une autre publication. Cet essai de zine est un début timide pour inviter à observer ce qui nous entoure.

Je vous ai partagé différentes possibilités de ce zine que je n’ai pas encore mis en forme tout au long de cette publication. On verra ce que ça donne au final ! Il sera dans le kit d’illustration d’hiver de la Tribu du Shiso et disponible en téléchargement libre rapidement. Je serais très contente si au moins une personne tentait l’expérimentation avec mon zine !

🍂 Cette publication est parrainée par mes camarades de la communauté Patreon et Liberapay
🌻 Date de publication anticipée sur ma page Patreon : 30 Nov. 2022